Amélie Nothomb | Entre nous … et les autres !

Amélie Nothomb

Antechrista

Depuis ce jour en 1992 où un collègue m’a prêté un de ses livres, à l’époque Hygiène de l’Assassin que j’ai dévoré en deux jours, j’adore Amélie Nothomb. Chaque nouveau livre est une nouvelle aventure vers l’âme humaine. Je vais vous présenter un de ses romans publié en 2003 Antéchrista.

J’étais au coin du feu et je cherchais dans ma bibliothèque un livre pas trop volumineux, à déguster tout de suite. Je suis tombée sur Antéchrista. Je l’ai lu d’une traite. Quel bonheur …

 

 

 

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Amélie Nothomb, fille de diplomate belge, est née le 13 août 1967 à Kobé au Japon. Elle publie sa première œuvre en 1992 et depuis une fois par an. C’est le rendez-vous à ne pas manquer de la rentrée.

Je l’ai encore vue à l’émission La grande librairie qui fêtait ses vingt ans et j’étais sous le charme. J’ai d’ailleurs passé deux heures formidable.

Voici un extrait :

«  Soudain, on troqua les punitions au martinet pour les punitions à la serpillière : les slows. Des garçons tombèrent sur des filles. Un type qui était normal m’emmena et m’enlaça. Je lui demandai comment il s’appelait :

-          Renaud. Et toi ?

-          Blanche.

Apparemment, ces présentations lui suffirent car, l’instant d’après, je me retrouvai avec une bouche sur la mienne. Ces mœurs me semblèrent étranges, mais comme je n’avais jamais été embrassée, je décidai d’analyser ça.

C’était bizarre. Il y avait une langue qui ondulait comme le monstre du Loch Ness contre mon palais. Les bras du gars exploraient mon dos. C’était étonnant de se sentir visitée.
Ce tourisme dura longtemps. J’y prenais goût.
Une main m’attrapa l’épaule et me retira de l’étreinte. C’était Christa.

-          Il est tard, on s’en va, dit-elle.

Renaud me salua d’un signe de tête que le lui rendis.
En quittant la salle, je m’aperçus que, çà et là, sur le sol bétonné, des garçons et des filles se caressaient de façon significative. Si Christa n’étais pas venue me chercher, peut-être cela me serait-il arrivé, je n’en savais rien.
Pas de doute, il s’était passé quelque chose. Je ressentais une véritable exaltation. J’étais ce personnage ridicule et extatique : une fille de seize ans qui a reçu son premier baiser. De telles sottises grandioses en valaient la peine.
Je ne disais rien. Christa, qui n’avait rien manqué de cet événement, me regardait en coin, l’air de penser que mon émoi était le comble du grotesque. Elle avait certainement raison mais j’espérais qu’elle se tairait : chaque être a droit à son petit bon heur niais, j’étais enfin en train de vivre le mien, ces joies-là étaient fragiles, il suffirait d’un mot pour les anéantir.
Hélas, Christa ne garda pas le silence dont j’avais besoin. Elle lança :

-          Ces soirées étudiantes, c’est vraiment l’Armée du Salut ! Même les laissées-pour-compte y trouvent leur affaire !

Et elle éclata de rire.
Sidérée, je la regardai. Elle planta ses yeux dans les miens et je vis qu’elle savourait mon humiliation. Son hilarité reprit de plus belle.
Un éclair me traversa le crâne : « Elle ne s’appelle pas Christa ! Elle s’appelle Antéchrista ! »

 

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